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Oui,
quand on est dans ce type de compagnies, (Heartland sur Universal)
tu ressens qu'il y a deux niveaux; celui du jazz de variété
et tout ce qui est lié à sa promotion et le
nôtre, c'est-à-dire le deuxième niveau
où tout n'est pas parfait. L'attaché de presse
n'est pas présent parce que parti avec la star, ou
des préparatifs sont oubliés pour le concert.
Tu le vis mal parce que tu t'investis dans ton projet, dans
ce que tu penses être de la qualité et cela entraîne
à la fin une sensation de frustration puisque la firme
ne s'investit pas sur toi. Je crois qu'il faut éviter
d'aller dans ces firmes si on ne répond pas à
leurs critères de sélection.
Nous aussi,
on croyait que les majors allaient changer notre vie et c'était
faux. Nous avions de plus grandes attentes et donc c'est la
complète déception. |
De plus en
plus, des musiciens refusent de travailler pour ces firmes, car
pendant des années, on leur fait miroiter des possibilités
et il faut parfois beaucoup de temps pour découvrir le
miroir aux alouettes. A la fin, tout le monde est déçu
car pour les deux parties, les ventes sont faibles et de plus,
le marché du jazz est déjà très petit.
Il ne reste donc plus grand chose aux musiciens de deuxième
niveau si les stars occupent une large part du marché grâce
à une promotion d'enfer. Maintenant, on peut être
star et de très grande qualité. Comme on peut être
de deuxième niveau et grand musicien. L'un et l'autre ne
sont pas incompatibles. Même des grandes vedettes, comme
Paolo Frésu, se méfient de tout cela.
Notre prochain
disque est produit par notre agent. Pour faire un bon projet,
il faut une synergie entre l'agent, la maison de disques, l'attaché
de presse et l'organisateur des tournées. Et cela n'existe
pas forcément chez les majors si tu es dans la catégorie
non-star.
Le
rapport du musicien de jazz avec l'argent ?
Cela change la vie concrètement. Et cela modifie
aussi la vision qu'on a de soi-même en reconnaissant
qu'on est prêt à vous payer une certaine somme
pour votre travail.
Votre
avis sur le marché du jazz et les médias ?
Le marché est minuscule. Le classique et le jazz
représentent à peine 1 % des ventes de CD.
Quand on enlève les grands stars, il ne reste pas
grand chose. Chez nous, les droits d'auteurs sont une propriété
intellectuelle. Aux Etats-Unis, c'est un produit qu'on peut
négocier et vendre. Cela change tout dans les rapports
professionnels.
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Aujourd'hui,
tout est formaté dans les médias et les radios.
La musique de jazz n'est pas formatée pour eux, notamment
au point de vue timing, car des morceaux de trois minutes ne permettent
pas de développer intro et thèmes. On ne reste pas
dans cette bulle parce qu'on veut y être mais parce qu'on
nous y met car les radios sont rébarbatives à cette
musique. On arrive dans une époque où plus personne
ne fait ce qu'il doit faire. Le marché de la musique est
difficile même dans la variété car il y a
une sorte d'état de panique. Si on cède les droits
à une radio, on y passera. Mais dès lors, ils peuvent
faire ce qu'ils veulent avec le morceau et ce n'est pas leur rôle.
Beaucoup de
musiciens produisent eux-mêmes leurs disques et là
non plus ce n'est pas leur fonction. Les musiciens doivent jouer
de la musique et les maisons de disques s'occuper du reste. Pourquoi
leur céder des droits ? Parce qu'ils ne font pas leur boulot
de promotion et essaient de récupérer leurs faibles
ventes par les royalties. Et ce n'est pas leur rôle non
plus.
Comment
était Berklee à votre époque ?
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