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Korn + Soulfly + Flyleaf, 06/06/2006, Zénith de Lille.

En ce sixième jour du sixième mois de la sixième année (6.6.6), rien de tel que de voir arriver l'Antéchrist avec un bon concert de métal bien juteux. En ce 6 juin, ce sont les américains qui nous refont le coup du débarquement avec l'artillerie lourde grâce à Korn, qui a abordé les côtes européennes à l'occasion de sa tournée mondiale de promotion de la dernière galette en date, "See you on the other side". Les fondateurs du néo-métal au début des années 90 sont actuellement au sommet de leur carrière avec ce septième album qui continue de les imposer comme leaders du néo, loin devant leurs concurrents de Linkin' Park ou de Limp Bizkit.

Korn, c'est la grande aventure d'une bande de types de Bakersfield (Californie du Sud) qui avait décidé de tromper l'ennui de leur bled natal en se déchirant les tympans avec un savant mélange de métal en fusion et de hip-hop dépressif. La recette a fait date et aujourd'hui, Jonathan Davies (chant), Minky (guitare), Fieldy (basse) et David Silveria (batterie) voient leur musique reconnue par leurs pairs et ont même une allée à leur nom dans leur chère ville de Bakersfield.

Korn sait marquer l'imaginaire par quelques caractéristiques bien à lui : la cornemuse de Jonathan Davies (qui évolue sur scène en kilt), la basse accordée en do de Fieldy (ce qui en fait un des bassistes les plus telluriques du monde) et l'univers maladif et torturé du groupe (dont toutes les pochettes représentent des enfants et dont le chanteur a subi une cure psychiatrique après avoir travaillé quelques années dans une morgue).

Pour la troisième fois, je vais me prendre leur prestation live plein la face, d'autant plus heureux de me rendre à Lille qu'il y aura aussi au programme les équarrisseurs de Soulfly et leur charcutier en chef Max Cavalera. Il faut pour cela braver les embouteillages indescriptibles de la sortie de Bruxelles, puis se faufiler dans la circulation dense de Lille pour finalement se perdre un peu (dans ma ville natale, c'est un comble) avant de trouver le Zénith qui fait partie du nouvel ensemble Euralille et qui est une salle sympathique pouvant accueillir à peu près 7000 personnes. Le retard digne des chemins de fer mexicains que j'ai accumulé ne m'empêche cependant pas de me retrouver au deuxième rang, attendu par un camarade de concert qui m'avait retenu une petite place. Avec une seule main sur la barrière, ce sera suffisant pour affronter la tempête permanente qui va désosser le Zénith au cours des raids de Soulfly et Korn.

Mais auparavant il faut supporter la prestation insipide de Flyleaf, un quintet texan à chanteuse qui se démène tant bien que mal durant une demi-heure pour chauffer une salle entièrement dévouée à Soulfly et Korn. Ces petits jeunes professent un neo métal atmosphérique à la Eths et ils ont beau sauter très haut, ils restent encore le groupe n° 45625 sur la liste des prétendants à la gloire. Sauter, c'est bien mais le riff qui tue, c'est mieux. Et en la matière, les gamins de Flyleaf ont encore beaucoup à apprendre. Quand un des guitaristes attrape un archet pour jouer à Jimmy Page, on touche quasiment au sacrilège. La chanteuse qui gémit est bien mignonne et aurait une carrière prometteuse de strip-teaseuse dans un cabaret du Caire, mais ses tentatives de grognements avec sa petite voix fluette confèrent plus au ridicule qu'à autre chose. Quant aux guitaristes, ils m'amènent à penser qu'il faut vraiment réglementer la vente de guitares pour éviter que n'importe qui puisse mettre la main sur une six-cordes et jouer n'importe quoi. Après une ballade soporifique d'un romantisme creux, il est temps de sortir de scène dans l'honneur afin de laisser encore un peu au public l'illusion que Flyleaf peut progresser à l'avenir. En tous cas, c'est ce qu'on espère pour eux.

L'arrivée de Soulfly sur scène va remettre les pendules à l'heure. Le groupe de Max Cavalera, fondateur de Sepultura, en est à sa deuxième tournée européenne de l'année et enfonce à mains nues les rivets avec son thrash né dans la jungle brésilienne et capable de terrasser un éléphant rien que par le souffle de la basse. Evidemment, en première partie, la prestation de Soulfly est plus limitée et le groupe joue neuf titres parmi ses plus costauds. Je reconnais entre autres les jouissifs "Babylon", "Prophecy", "Frontlines" "Bleed" (du premier album), l'indispensable "Blood bloody roots" de l'époque Sepultura, "Policia" (encore une reprise de Sepultura) et "Eye for an eye" du premier album qui conclut une prestation brutale et impitoyable. Cependant, Max Cavalera semble souffrir d'une sérieuse angine et doit traiter régulièrement sa voix enrouée au spray pour la gorge. Eh oui, quand on a l'habitude de se chauffer au soleil de l'Arizona (la résidence actuelle de Max), venir traîner dans une Europe qui culmine à 13° C de moyenne est forcément un exercice dangereux pour la santé. C'eut beau être court, ça n'en est pas moins efficace et ravageur et le public ne s'y trompe pas en bondissant sauvagement en tous sens pendant les trois quarts d'heure du set. Il faut dire que la moyenne d'âge (15-17 ans à tout casser) permet aux mômes de se donner à fond sans se fatiguer. Il faut donc retirer son chapeau devant Soulfly et reconnaître la grandeur de l'art et de la manière dont Max Cavalera et ses hommes démantèlent les tympans et tronçonnent le riff gras, notamment grâce aux fameuses guitares à quatre cordes du sieur Cavalera.

Mais évidemment, c'est Korn qui attire toute l'attention ce soir et le public attend impatiemment un groupe qui se fait attendre alors que les roadies installent longuement la scène. Il y a parmi eux quelques frimousses directement sorties des bas quartiers de Los Angeles, de la mafia guatémaltèque ou autre et qu'il ne ferait pas très bon de rencontrer le soir dans une rue sombre. Egalement, le fameux pied de micro de Jonathan Davies, superbe femme stylisée en métal argenté, est installé sur scène sous les ovations du public. Finalement à 22h15, les combats commencent. Korn va aplatir le Zénith de Lille avec 90 minutes intensives d'un show qui présente de nombreux titres du nouvel album (six en tout) et qui va chercher des titres dans les disques classiques des années 1994-2000. Entre les deux, les albums "Untouchables" (2002) et "Take a look in the mirror" (2004) sont un peu mis à l'écart, le second n'étant représenté que par "Counting on me". Il est vrai que cet album avait été assez critiqué lors de sa sortie, la presse dénonçant son manque de cohérence et la répétition en moins inspiré de "Untouchables". C'est aussi le dernier album avec le second guitariste Head qui a depuis quitté le groupe pour entrer en religion. Cette défection n'a pas brisé l'élan de Korn qui a sorti l'année dernière un très bon album, corroborant l'idée d'une mutation de la musique du groupe vers quelque chose de moins hip hop et de plus métallique, avec une sérieuse option prise sur le côté dansant et mélodique, dont certaines rythmiques aériennes font parfois penser à du Led Zeppelin époque "Kashmir". Sur scène l'absence de Head est compensée par un guitariste qui se tient dans le fond, un masque blanc sur les yeux. Il n'est pas le seul figurant puisqu'on trouve également un claviériste, un percussionniste et une choriste, qui ont tous sur la tête des masques d'animaux (vache, cochon, lapin), rappelant le concept de la pochette de "See you on the other side", sans doute la plus belle pochette d'un album de Korn à ce jour.

Le jeu de scène de Korn est toujours égal à lui-même et on pourrait juste regretter la sobriété du décor, qui a parfois été plus inventif. Je me souviens de ce concert à Paris Bercy en juin 2000, avec une cage dans le fond renfermant une quarantaine de spectateurs. Ici, il y a juste des cubes alignés qui représentent chacun une pochette d'album. Le batteur est dissimulé derrière une forteresse de fûts et de cymbales, dominant le tout sur une estrade impressionnante. Avec son camarade Fieldy et sa basse brontosaure, il écoule sur le public des tonnes de sons en couches basaltiques. Jonathan Davies circule, marcel et kilt noirs sur des chaussettes montantes (si vous voulez draguer avec ce genre de look, oubliez tout de suite : vous n'êtes pas Jonathan Davies). Il saisit sa cornemuse pour annoncer un medley qui rafraîchit les mémoires avec des extraits du premier album "Korn", de "Life is peachy" et de "Issues", l'intelligentsia des disques de Korn. Les explosions sonores appuyées par des headbangings furieux du groupe se répercutent dans la foule qui jaillit comme une marée de gnomes furieux.

Après ce traitement de choc décliné tout au long des 14 morceaux du set principal, Korn réapparaît pour un rappel de trois titres qui va achever la dévastation déjà bien avancée du public : "Twisted transistor" (le hit du dernier album), le classique "Freak on a leach" (de "Follow the leader") et surtout l'indéboulonnable "Blind", premier morceau du premier album annoncé par un Jonathan Davies enfin sorti de sa réserve et qui excite une dernière fois le public en lui annonçant que c'est aussi l'anniversaire du guitariste Munky. Après un "Happy Birthday" de rigueur hurlé par 7000 gorges déployées, "Blind" vient tout faire péter pour l'hallali final.

Voilà, là où Korn passe, rien ne repousse et ceux qui veulent encore en profiter peuvent traquer le groupe au Graspop Festival de Dessel (Belgique) le 24 juin ou à Bercy le 25 juin, date qui sera sans doute grandiose comme tous les concerts de Korn à Paris, ville adorée par le groupe.

François.

Set list :

It's on / Clown / Divine / Love song / Falling away from me / Souvenir of sadness / Here to stay / Liar / Counting on me / Somebody Someone / Throw me away / Medley (Shoots and ladders - Need to - Lies - Make me bad - Thoughtless - A.D.I.D.A.S - Twist) / Coming undone / Got the life / Twisted transistor (rappel) / Freak on a leach (rappel) / Blind (rappel).

 


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