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Je ne rêve peut-être pas de cela exactement mais c'est une bonne question qui n'est pas indiscrète et je suis contente que vous me la posiez. On nous demande toujours nos avis sur le jazz mais les questions relatives à notre état de femme sont régulièrement éludées. Enfin ! On évoque rarement la partie composition. Or c'est important dans ma vie. Cela demande beaucoup de concentration. D'ailleurs, je ferais tout d'abord le distinguo entre chanteuse et compositrice. Je chante et je compose et il n'est pas facile de se faire respecter dans ce milieu comme compositrice. J'ai dû chanter durant dix ans avant d'être respectée comme compositrice. Ensuite, il y a la femme de scène et la femme privée. Celle-là a parfois aussi envie d'enfant et d'amour. Ce n'est pas facile car il n'y a pas beaucoup d'hommes qui résistent à ce mode de vie. Vivre avec une chanteuse est cauchemardesque ! Tandis qu'une femme de musicien peut accepter beaucoup ! Par exemple, s'occuper des enfants pendant que l'homme s'absente pour son métier. Au début, quand on rentre à quatre heures du matin, cela marche encore. Mais avec le temps cela lasse très vite un homme qui ne fait pas la même chose que vous. Au début, il vous fait couler le bain et ensuite, il vous laisse le faire couler toute seule. Il faut trouver quelqu'un qui accepte cela. Ensuite quand on l'a trouvé, il faut encore le garder! Une chanteuse fait encore des tournées et en ce qui me concerne je fais un disque par an. Un peu comme un bébé ! Et cela provoque déjà beaucoup d'accouchements successifs ! Routes, promotions, scène… Pas facile de prévoir un vrai enfant dans tout cela ! J'ai trente-quatre ans et il me reste encore quelques années avant de prendre cette décision.

Ressentez-vous un certain machisme dans le milieu?
Oui terriblement ! Quand une femme de vingt ans ne vient pas d'une école de musique, elle est considérée comme une poupée, comme quelqu'un à qui on propose de chanter pour garnir la scène. Par contre si j'avais joué d'un instrument, on m'aurait plutôt montré les ficelles du métier. Ensuite, comme les concerts marchent mieux avec une chanteuse, on te propose de chanter les standards. Le jazz n'est pas que du réchauffé ! Il est aussi évolutif et dérangeant ! En tous cas, c'est ce que je crois ! Et moi, je ne souhaitais pas chanter sans faire de vagues à la façon "Billie" ou "Ella". Je les respecte trop pour cela et de plus, j'ai toujours préféré les interpréter à ma façon. Mais à l'époque, on me donnait un avis sur tout. Tu devrais faire ceci ou cela… ou faire du New Orleans… Ou encore, tu n'es pas faite pour ceci ou pour cela...
Alors, dernière étape, quand nous arrivons avec nos propres compositions, comme nous ne sommes pas très nombreuses à être femmes et compositrices en jazz, cela chauffe parfois. Mais le temps et des rencontres parfois magiques aplanissent tout cela. Pour moi, beaucoup de choses ont changé depuis trois ans.

Ressent-on moins de racisme lorsqu'on est métisse et artiste connue que si on est métisse et caissière ?

Tout d'abord, le racisme existe et existera toujours à notre époque ! C'est l'Arabe qui est visé.
En effet, il n'est pas facile d'avoir une tête d'Arabe de nos jours. Je pense que peu de blancs aimeraient échanger leur tête pour celle d'un Arabe car nous savons qu'ils subissent plus de délits de faciès que les autres. Si par contre, dans la profession, être femme n'est pas toujours un avantage, dans la vie par contre, être femme de couleur passe souvent mieux car on inspire pas ou peu de craintes. Cela passe mieux partout et on aura moins de problèmes. C'est le coté masculin qui fait peur ! Moi, j'ai retiré le mot racisme de mon vocabulaire donc je le ressens moins car je n'y pense pas.

Car il faut savoir que certains personnes de couleur attendent aussi l'insulte et sont en position défensive et agressive. Elles ont tellement ce mot dans la tête et sont souvent mal avec leur métissage. Elles sont prêtes à monter très vite sur le sujet. Comme Dieudonné. Je les plains car pour moi c'est une chance d'être métisse. Je ne supporte pas d'entendre critiquer ni les blancs, ni les noirs car il y a les deux en moi. Je ne me pose jamais ces questions. Donc je ne ressens pas réellement le racisme dans ma vie. A l'exception de quelques regards qui ont peu d'importance. Quand je suis en Afrique, je suis blanche ! Quand je suis en Europe, je suis noire !

Qu'auriez-vous pu faire sans la musique ?

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