Killing Joke et Confuse The Cat, 26/04/2006, Het
Dépôt, Louvain (Belgique).
Entre le punk et la new wave, au début
des années 80, il y eut Killing Joke et peu de gens savent
que ce groupe eut le génie d'associer la rugosité
du punk, la puissance du métal et la maîtrise technologique
pour se poser en précurseur de l'indus. En effet, sans
Killing Joke, pas de Nine Inch Nails, pas de Ministry et pas de
Rammstein. Près de trente après leurs débuts,
les gens de Killing Joke repassent à l'attaque sur l'Europe
pour venir défendre "Hosannas from the basements of
hell", leur dernier album en date qui fait suite à
un déjà très convaincant album éponyme
en 2003. Le groupe a eu des hauts et des bas mais on peut dire
que depuis une dizaine d'années, la Blague Qui Tue a réussi
à maintenir le cap et rallier à sa cause non seulement
les amateurs d'indus et de punk, mais aussi les métallurgistes
de tous poils qui aiment les riffs bien bruts de décoffrage.
Je débarque à Louvain avec un ami
qui n'a plus fait de concert depuis bien longtemps mais qui a
sauté sur l'occasion de revoir Killing Joke, qu'il avait
vu en action il y a vingt ans. Nous arrivons tôt au Dépôt
et cela est récompensé puisque nous croisons le
chanteur Jaz Coleman qui nous salue et bavarde un peu avec nous.
On en profite évidemment pour faire dédicacer nos
billets. Jaz a l'air bien content d'être là, sa bonne
humeur étant sans doute accentuée par les kirs royaux
qu'il continue d'écluser à la terrasse du café
d'à côté. Voilà une bien belle façon
de commencer un concert. Il faudra malheureusement attendre que
Confuse The Cat, le groupe de première partie, ait fini
un set ennuyeux pour profiter pleinement des bienfaits de la musique
de Killing Joke.
Les quatre musiciens de Confuse The Cat ont oublié
qu'il y avait une vie après U2 et Depeche Mode et jouent
en une demie heure huit titres d'une simili cold wave impersonnelle
et entendue déjà des tas de fois. Les types ont
de vieilles guitares Fender Jazzmaster ou Rickenbacker et jouent
aussi une musique qui a vieillie. Les approximations du show n'améliorent
rien et le chanteur n'arrête pas de perdre la bretelle,
le jack de sa guitare ou de donner involontairement des coups
de manche dans le micro. Il y a des jours où certains groupes
devraient vraiment prendre de la drogue pour trouver l'inspiration.
A 21h15, Killing Joke, annoncé par la chanson
"The faith heeler" du Sensational Alex Harvey Band,
prend la scène d'assaut et va molester un public dont les
effectifs tournent autour des 400 personnes. Tant pis pour ceux
qui ne sont pas là car pendant 90 minutes, ça va
être le bonheur total, avec un Jaz Coleman parfait dans
sa combinaison noire et son maquillage à la Alice Cooper.
Ses complices entretiennent une onde de choc monumentale et le
bassiste aux chaussures aussi épaisses que ses riffs et
à la houppe de Tintin cybernétique est pour beaucoup
dans le pilonnage sonique qui règne sur scène. Ce
dernier remplace au pied levé l'habituel bassiste Paul
Raven, parti momentanément tourner avec Ministry. Le claviériste
n'a pas son pareil pour larder les neurones de griffures industrielles
imparables et le guitariste Geordie Walker, impassible sous sa
casquette, décortique des accords hantés sous le
martèlement ignominieux de la batterie de Benny Calvert,
enfoncé dans l'obscurité du fond de la scène.
L'éclairage est en effet minimaliste et participe à
l'atmosphère angoissée attisée par un Jaz
Coleman agissant tantôt en mécanicien hébété
du rythme, tantôt en diablotin primesautier souriant au
public.
Le groupe capitalise sur son passé et propose
une set list composée de titres anciens d'à peu
près toutes les époques et de quelques chansons
nouvelles du dernier album ("Hosannas from the basements
of hell", "Majestic", "Gratitude"). Le
tout premier album de 1980 est particulièrement mis en
valeur avec cinq titres, dont les immortels "Wardance"
et "The wait" (qui fut repris en son temps par Metallica).
L'autre grand album des années 90, "Pandemonium",
n'est pas en reste avec "Communion", "Whiteout"
et "Pandemonium". Le rajout in extremis sur la liste
de "Money is not our God" (de l'album "Extremities
dirt and various repressed emotions" de 1990) ravit les fans
de la première heure. Chaque titre représente un
sommet du concert, tant l'interprétation est tranchante.
Sans trop remuer, Killing Joke dégage une présence
et une énergie incroyable, la patte des grands.
Avec un rappel de trois titres composé
de "Gratitude", "Unspeakable" et "Pandemonium",
le groupe achève de triompher et reçoit l'ovation
d'un public qui a modérément bougé mais qui
a bien pris son pied. La set list que j'avais sous les yeux disparaît
sous mon nez mais je me venge en allant piquer celle de la batterie.
Set list : Communion / Wardance / Primitive /
Total invasion / Requiem / Blood sport / Hosannas from the basements
of hell / Money is not our god / Frenzy / Majestic / Asteroid
/ Whiteout / The wait / Psyche / Gratitude (rappel) / Unspeakable
(rappel) / Pandemonium (rappel).
François.
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